Le juge des enfants : un juge à double casquette, entre protection et répression.
Tout le monde a déjà entendu parler du juge aux affaires familiales. Ce dernier est notamment compétent en matière de divorces et de fixation de l’autorité parentale.
En revanche, peu de personnes connaissent le juge des enfants. Ce magistrat spécialisé du siège du tribunal judiciaire joue pourtant un rôle majeur dans la protection de l’enfance en danger et la répression des mineurs délinquants.
La protection de l’enfance en danger
Les articles 375 et suivants du Code civil prévoient la compétence du juge des enfants lorsque la santé mentale, la sécurité physique ou matérielle ou, d’une manière globale, l’éducation d’un mineur sont en danger. La loi parle ici du « développement physique, affectif, intellectuel et social » de l’enfant. C’est notamment le cas « lorsque les parents présentent des difficultés relationnelles et éducatives graves, sévères et chroniques […] affectant durablement leurs compétences dans l'exercice de leur responsabilité parentale ».
Il arrive malheureusement que lors d’une séparation, les parents ne parviennent pas à s’entendre sur la garde et l’éducation à donner à leurs enfants. Le cadre éducatif des enfants est alors bouleversé, ce qui peut avoir de graves conséquences pour eux.
Il est alors important d’agir dans leur intérêt.
En effet, l’intérêt de l’enfant est la clef de voute de toute décision prise par le juge des enfants. Contrairement aux juges aux affaires familiales, le juge des enfants ne va pas se concentrer sur les différents entre les parents mais sur leurs conséquences sur les enfants.
Lors d’une audience devant le juge des enfants, inutile donc de reprendre l’historique des faits que vous reprochez à votre ex-conjoint(e).
Le juge des enfants peut notamment être saisi par l’avocat de l’enfant ou de l’un de ses parents.
Lorsque l’enfant est en âge de s’exprimer, c’est-à-dire aux alentours de 9 ans, le juge prend toujours le temps de dialoguer avec lui afin de comprendre ce qu’il ressent et ce dont il a besoin.
Le juge entendra ensuite les parents et leurs avocats.
A la suite de cela, il rendra son jugement dans lequel il indiquera quelles mesures d’assistance éducative sont ordonnées.
Le juge des enfants peut imposer des mesures de suivi et d'aide à la famille. Dans ce cas, une aide extérieure est apportée aux parents afin de les aider à surmonter leurs difficultés familiales. L’enfant reste alors avec sa famille et une personne qualifiée ou un service spécialisé est désigné pour cette mission. Ce tiers a pour rôle de conseiller la famille, suivre le développement de l’enfant et rendre des rapports au juge régulièrement.
Dans les cas les plus graves, le juge des enfants peut prendre des mesures de placement. Les parents conservent alors leur autorité parentale mais l’enfant est placé chez un tiers.
Plusieurs mois après avoir rendu sa décision, le juge des enfants reconvoquera les parents et le ou les enfants afin d’apprécier l’évolution de la situation familiale. Il décidera alors de renouveler ou non les mesures d’assistance éducatives.
L’avocat joue un rôle important dans ces procédures car il accompagne et conseille juridiquement la famille dans cette période souvent compliquée.
L’éducation d’un enfant allie protection et répression de l’enfant, c’est pourquoi le juge des enfants est également compétent pour juger, en matière pénale, les contraventions de 5ème classe et les délits commis par des mineurs. Pour les crimes, le jugement sera rendu par le tribunal pour enfants dont fait partie le juge des enfants.
La répression des mineurs délinquants
Il existe en droit pénal une exigence de personnalisation de la sanction pénale. Cela signifie que chaque situation doit être prise en compte individuellement afin que la réponse pénale soit la plus adaptée possible. C’est pour répondre à ce principe que les enfants délinquants ne sont pas présentés au juge pénal de droit commun mais devant le juge des enfants.
En matière de justice répressive, le juge des enfants doit tenir compte des circonstances de l’infraction et de la personnalité du mineur afin d’apporter à la peine une dimension éducative. Le but premier du juge est alors de prévenir au maximum la récidive en remettant le mineur sur le droit chemin. Ainsi, l’éducation prime toujours sur la répression.
Ceci implique que le juge des enfants ne prononce une peine à l’encontre du mineur qu’en dernier recours, seulement s’il estime qu’une mesure d’assistance éducative ne suffit pas. En outre, l’excuse de minorité permet d’atténuer la peine d’un mineur comparé à celle d’une personne majeure.
La procédure devant le juge des enfants est elle aussi particulière puisqu’une première audience lui permet de juger la culpabilité de l’enfant et une seconde, intervenant 6 à 9 mois après, est une audience de prononcé de la sanction. Entre ces deux audiences, une mise à l’épreuve éducative permet au juge de garder un œil sur le comportement du mineur et de s’assurer du fait qu’il ne récidivera pas. La sanction dépendra de l’attitude et de la détermination de l’enfant durant cette période. Ainsi par exemple, si le dommage causé par l’enfant est réparé entre les audiences, le juge rendra une déclaration de réussite éducative.
Le juge des enfants s’assure également de l’exécution des peines prononcées. A titre d’exemple, en cas de motif grave d’ordre médical, familial ou social, le juge peut suspendre, aménager ou fractionner une peine.
Le juge des enfants est donc un magistrat essentiel au sein des tribunaux judiciaires. Il est le garant de la santé et la sécurité des mineurs. Il veille à ce que les enfants bénéficient d’une éducation saine et il dispose de pouvoirs importants pour recadrer les situations dans lesquelles il existe un mal être chez l’enfant.
L’avocat est l’allié du juge des enfants car tous deux suivent le même objectif : protéger l’intérêt supérieur de l’enfant.